La procédure de divorce se déshumanise, elle devient une pure formalité administrative à résonnances financières. Jusqu’à la réforme du divorce de 2021, le divorce judiciaire se déroulait en deux étapes.
Les époux avaient un espace de parole lors de l’audience de tentative conciliation qui leur permettait de vivre officiellement leur divorce devant le Juge. Suite à cette audience, le Juge aux affaires familiales rendait une ordonnance de non-conciliation, qui fixait les mesures provisoires applicables durant la procédure de divorce. Ensuite, il était nécessaire d’assigner pour obtenir un jugement de divorce.
Avant 2004, un Juge conciliateur à l’écoute : pourquoi divorcez-vous ?
Lors de l’audience de tentative de conciliation préalable au divorce, le Juge aux affaires familiales avait deux rôles. Dans le secret de son bureau, sans leurs avocats, il écoutait les époux, l’un après l’autre, sur les raisons profondes de leur divorce. Selon la nature des échanges, il essayait de rapprocher les époux, en vue d’éviter le divorce.
A partir de 2004 : acceptez-vous de divorcer ?
La réforme du divorce de 2004 a supprimé le rôle de « réconciliateur » du Juge aux affaires familiales. Pour les époux, il n’est plus question d’évoquer les motifs de leur séparation devant le JAF. Les sentiments et les émotions, pourtant humaines, n’ont plus leur place.
L’audience de tentative de conciliation a été maintenue, mais elle a été vidée de son humanité. L’entretien individuel avec le JAF se limite à tenter de convaincre les époux de signer un procès-verbal d’acceptation du principe du divorce. Ce procès-verbal interdit définitivement aux époux d’évoquer leurs griefs mutuels dans la suite de la procédure de divorce. Il a pour objectif, a priori, d’apaiser le conflit et d’accélérer autant que possible l’issue du divorce, en se concentrant sur les conséquences du divorce et non sur ses causes.
2017 : si vous êtes d’accord, vous n’avez plus besoin du Juge
Avant 2017, le divorce par consentement mutuel était validé par un jugement de divorce qui homologuait la convention de divorce préparée par le ou les avocats des époux. Le Juge aux affaires familiales vérifiait le consentement éclairé des époux, et l’équilibre des mesures consécutives au divorce (financières et concernant les enfants).
Depuis janvier 2017, le divorce dit « par consentement mutuel » a quitté les tribunaux. Il se déroule dorénavant entre les deux avocats des époux, qui rédigent un acte d’avocats enregistré par un notaire. Plus personne ne joue le rôle d’arbitre neutre et impartial. Ainsi les avocats, rémunérés directement par leurs clients, se retrouvent parfois dans une situation où les époux souhaitent valider une convention de divorce pourtant déséquilibrée. Ils ne peuvent plus s’en remettre à la sagesse du juge.
Pour en savoir plus sur le consentement mutuel
2021 : la justice vous enlève la parole
La réforme du divorce qui sera mise en œuvre en janvier 2021 met définitivement fin à l’audience de tentative de conciliation. Le divorce devient une procédure écrite avec représentation obligatoire par avocats. Le Juge aux affaires familiales ne rencontre plus les époux. Il s’en tient aux écritures et aux pièces. Au moment de l’audience dite « de plaidoiries », les juges continueront de préférer les « dépôts de dossier » au débat oral.
Les époux n’ont pas rencontré leur juge. Même la plaidoirie des avocats est remise en question. Le passage devant le juge, qui correspondait à un rituel de consécration de la fin de la vie maritale, a disparu. Ainsi le divorce se banalise et se déshumanise.
Puis-je en déduire qu’il appartient maintenant aux avocats de redonner tout son sens au divorce ? Le rendez-vous de signature de la convention de divorce par consentement mutuel me semble idéal pour ritualiser la séparation. Dans un espace de parole bienveillant, les époux peuvent se souvenir qu’ils se sont aimés, qu’ils ont cheminé ensemble, et que maintenant leurs chemins se séparent.
Le divorce, une renaissance pour toute la famille : témoignage d’un client
Voici le témoignage reçu d’un client, qui n’osait pas divorcer, craignant la réaction de son épouse.
« Il y a un an, je venais vous demander conseil pour divorcer… Et aujourd’hui je suis heureux de pouvoir vous dire que vous m’avez bien conseillé… C’était la meilleure solution.
En effet, les enfants nous ont avoué après la séparation qu’ils étaient également favorables à notre divorce et que la situation est meilleure pour eux à présent. Cet évènement a fait évoluer positivement tous les membres de la famille. Les deux grands ont changé d’orientation dans leurs études, pour écouter leurs véritables aspirations. Le dernier va également beaucoup mieux.
Les enfants passent régulièrement voir leur mère quand ils le souhaitent. Comme elle me l’indiquait récemment : « Finalement, maintenant nous ne partageons que les bons moments ensemble. »
Enfin, pour moi, c’est aussi très positif. Je ne suis plus épuisé par toutes les tâches de la maison. J’ai retrouvé l’amour avec une compagne.
Un an après, je ne regrette pas d’avoir fait le choix de divorcer dans la bienveillance de l’autre…. Même si économiquement ce fut compliqué au début. »
Les conseils de Maître LELACHE, avocate en droit de la famille à Versailles
N’oublions pas que, même s’il peut y avoir des enjeux financiers, ce sont des êtres humains qui se séparent à l’occasion d’un divorce. Afin de mieux vivre cette épreuve, et de vous reconstruire plus vite, vous pouvez la traverser « en conscience », dans le respect et la bienveillance mutuels.
Vos enfants vous en remercieront.
Je termine par ces paroles de sagesse hawaïenne : « Merci, désolé, je t’aime. »